Histoire de lOrdre de Saint-Jean de Jérusalem |
![]() |
LOrdre souverain, militaire et hospitalier de Saint-Jean de Jérusalem, dit de Rhodes, dit de Malte, fut fondé au XIIe siècle pour soigner les pèlerins qui se rendaient en Terre Sainte. Dès 1048, des marchands italiens dAmalfi avaient obtenu de construire à Jérusalem, face au Saint Sépulcre, un hospice tenu par des moines bénédictins. A larrivée de la première croisade en 1099, cet hôpital, placé sous la protection de saint Jean-Baptiste, était dirigé par un frère nommé Gérard. Son dévouement auprès des pauvres et des malades impressionna fortement un certain nombre de jeunes croisés qui demandèrent à entrer dans la communauté. Le pape Pascal II reconnut les Hospitaliers comme un Ordre religieux en 1113 . Sous la règle des Augustins, les futurs chevaliers devaient prononcer les 3 voeux monastiques de pauvreté, de chasteté et dobéissance. |
|
Gérard transforma le premier hospice de Jérusalem en un hôpital moderne pouvant accueillir 2000 malades. A sa mort en 1120, son successeur Raymond du Puy construisit dautres hôpitaux le long des côtes de Terre Sainte et décida délargir la mission originelle de lOrdre à la défense des pèlerins entre les ports et Jérusalem.
Dès lors, lOrdre devint militaire et les chevaliers firent un quatrième voeu, celui de défendre la foi chrétienne contre lislam. |
||
Ils semparèrent donc de Rhodes vers 1308, où ils continuèrent leur double mission hospitalière et militaire. Ils construisirent dabord une première infirmerie puis, au XVe siècle, un grand hôpital moderne. Comme à Jérusalem, chaque malade disposait dun lit individuel entouré de rideaux. Hommes et femmes se retrouvaient mélangés dans la grande salle, les chambres particulières étant réservées aux malades contagieux ou non chrétiens . Le linge était changé trois fois par semaine et on servait les repas dans de la vaisselle dargent, moins poreuse que létain, afin de lutter contre les épidémies. Dans la cour intérieure, les convalescents pouvaient reprendre des force et des repas étaient distribués chaque jour aux pauvres. |
![]() La grande salle de lhôpital de Rhodes |
|
Sur le plan militaire, alors que les autres puissances chrétiennes en Méditerranée déclinaient, les musulmans ne pouvaient accepter la présence des chevaliers dans leur zone dinfluence. Pour se protéger contre cette menace, les Hospitaliers construisirent dimpressionnantes fortifications autour de la ville. Le long des côtes, de nombreuses tours de guet permettaient dalerter la population qui, en cas de danger, trouvait refuge dans lune des cinq forteresses de lîle. Grâce à ces précautions, les chevaliers purent soutenir victorieusement plusieurs sièges des infidèles, notamment en 1444 et 1480. Mais en 1522, Soliman le Magnifique décida den finir avec les Hospitaliers. Il attaqua Rhodes avec des forces imposantes. Après six mois dune résistance héroïque, il ne restait que 168 chevaliers vivants, tous blessés. La population demanda alors au Grand Maître Villiers de lIsle Adam daccepter loffre de reddition de Soliman et lOrdre quitta Rhodes le 1er janvier 1523. |
||
![]() |
La flotte musulmane se présenta dans les eaux maltaises le 19 mai 1565. Après un mois defforts et la perte de 6000 hommes, les Turcs semparèrent du Fort St-Elme qui gardait lentrée des ports. Ils sattaquèrent ensuite à la petite ville du Borgo défendue par le gros des chevaliers. Les musulmans bombardaient les bastions sans relâche et la situation des assiégés devenait désespérée, lorsquenfin, en septembre, larrivée du Grand Secours, formé des chevaliers qui résidaient sur le continent, découragea les Turcs qui réembarquèrent. |
|
Du côté chrétien, de nombreux chevaliers étaient morts et lîle nétait que ruine. Le Grand Maître La Valette décida donc de construire une nouvelle ville sur la presquîle de Sceberras, entre les deux ports. A labri derrière de massives fortifications qui rendaient la cité pratiquement imprenable, lOrdre améliora son service auprès des pauvres et des malades. Dans le nouvel hôpital, les médecins visitaient les malades deux fois par jour, et linfirmier, deux fois par nuit. Des instructions étaient données au personnel de tout grade de traiter les malades avec charité et libéralité, sans négliger ce qui pourrait être utile à leur âme ou à leur corps. Dans cet esprit, lOrdre accordait une gratification au prêtre de léglise grecque chargé dadministrer les sacrements aux patients de sa confession et de sa nationalité. Afin déviter les épidémies, on construisit sur lîle Manoel un lazaret pour les quarantaines. Il était équipé dune chapelle, dun crématoire et dun cimetière. Même les morts y jouissaient dattentions particulières: dans la chapelle funéraire qui avoisinait linfirmerie, leurs corps étaient laissés vingt-quatre heures, les mains et les pieds liés par des cordelettes qui, au moindre mouvement, faisaient sonner des clochettes, afin déviter que lon nenterre ou ne dissèque des personnes en état de sommeil léthargique. LOrdre mit également sur pied une sorte de Sécurité sociale avant la lettre: Pendant leur maladie, les nécessiteux recevaient de largent et de la nourriture, voire des couvertures; les médecins de service à lhôpital leur rendaient visite à domicile. Les invalides recevaient également une rente et du pain. Dès 1555, lOrdre assura léducation et la formation des enfants trouvés, filles et garçons. Enfin, en 1732, il créa une maison destinée aux vieillards indigents. On y servait un repas par jour, composé dun petit pain, dune soupe de légumes, de poisson ou de fromage, et de viande les jours de fêtes. Dans le domaine militaire, si les Turcs ne revinrent jamais à Malte après le Grand Siège de 1565, lOrdre continua sa lutte contre lislam en Méditerranée et particulièrement le long des côtes dAfrique du nord. La vie dun chevalier de Malte Lorsquun jeune noble de 16 ou 17 ans arrivait à Rhodes, ou plus tard à Malte, sa première année était consacrée au noviciat. Les novices étaient regroupés selon leur langue dans des Auberges, dans lesquelles ils vivaient sous la direction dun membre âgé de lOrdre, appelé le Pilier. Cest là quils dormaient et prenaient leurs repas en commun. Une sévère discipline interdisait la consommation de vin après le souper et imposait le silence dans les chambres. Les journées des postulants et des chevaliers présents au Couvent étaient rythmées par les offices religieux, les exercices militaires, la garde aux remparts et le service à lhôpital. |
||
A la fin de leur noviciat, les postulants étaient autorisés à prononcer leurs voeux monastiques. Ils commençaient alors les quatre caravanes obligatoires pour lobtention dune promotion. Ces caravanes étaient des expéditions militaires contre les musulmans denviron six mois sur les galères de lOrdre. Si les escadres de Malte attaquaient régulièrement seules les bateaux musulmans, elles participaient également aux batailles navales livrées par les puissances chrétiennes pour mettre fin à la prééminence turque en Méditerranée, comme à Lépante en 1571 |
![]() |
|
Au cours de leurs caravanes, les jeunes chevaliers acquéraient une grande expérience de la mer, ce qui explique que beaucoup servirent également dans la Marine Royale française, dont les plus grands marins étaient des chevaliers de Malte, tels Suffren ou lamiral de Grasse. Après ces deux années obligatoires en mer, les jeunes chevaliers étaient affectés aux garnisons dans la mer Egée ou continuaient à se battre sur les galères. Ils pouvaient également remplir des emplois administratifs au Couvent ou rentrer dans leur pays pour servir leur souverain ou soccuper à leur gré. Lorsquils avaient atteint la cinquantaine et devenaient moins vaillants, on leur attribuait des commanderies sur le continent. Si un danger menaçait le Couvent, le Grand Maître rappelait tous les chevaliers présents en Europe, qui quittaient alors leurs activités pour aller défendre le siège de lOrdre. |
||
Le développement de lOrdre en Europe
Les donations à lOrdre de Saint-Jean de Jérusalem commencèrent avec la première croisade et lenthousiasme pour les institutions de Terre Sainte. Pendant le premier tiers du XIIe siècle, ce phénomène fut surtout visible en Provence et en Espagne, avant de se développer dans le reste de lEurope. |
||
Regroupés, ces biens étaient exploités et administrés sous la responsabilité dun commandeur. La plupart de ces commanderies comptait une maison principale, qui était le siège du commandeur, et des membres moins importants, disséminés dans la région. Leur but originel consistait à fournir gîte, couvert et soins aux pèlerins en route pour Rome ou Compostelle; elles abritaient toujours une salle dhospice, une église et une ferme. Avec la construction dauberges, le caractère hospitalier des établissements sestompa au profit de lexploitation agricole, dont une partie des revenus servait à lentretien de la commanderie, le reste étant envoyé au Couvent, afin de financer les hôpitaux, les fortifications et la flotte |
![]() Commanderie de Bubikon (Zurich) |
|
LOrdre de Malte aujourdhui
Depuis quil a quitté Malte, lOrdre a abandonné ses activités militaires pour se consacrer uniquement à sa vocation originelle: le service des pauvres et des malades, institué par le bienheureux Gérard lors de la première croisade. |
||
Michèle Zanetta
|